mardi 15 décembre 2009

Portrait d'un photographe angevin, Jean-François Rabillon

Entretien réalisé mardi 15 décembre 2009 à La Bohalle dans le Maine et Loire

Avertissement: Pour mieux saisir la personnalité de Jean-François Rabillon, dit Jef, je me dois de prévenir le lecteur que j'ai intentionnellement ôté de cette retranscription tout commentaire éclairant l'état d'esprit dans lequel se trouvait mon interlocuteur. Ainsi vous ne trouverez pas de (rires) ou (crispation) par exemple pour la simple et bonne raison qu'il faudrait ajouter toutes les deux phrases (éclat de rire).










Comment te définis-tu?
Je suis plus un témoin, un observateur privilégié qu'un artiste.
Pour moi, la photographie, c'est ma vie, je baigne dedans du matin au soir. Je ne me sens pas bien si, au bout de plusieurs jours, je n'ai pas pris une photo , c'est un élément nécessaire à ma vie.

Ce n'est donc pas suffisant de regarder avec tes yeux
C'est différent parce qu'avec un appareil tu focalises sur un élément du paysage, du décor qui va t'attirer, te toucher, souvent en corrélation avec la lumière d'ailleurs. J'aime le détail, la lumière. Puis j'ai envie de partager avec d'autres cette vision et comme le seul moyen dont je dispose c'est mon appareil...

Ce n'est pas différent de la démarche de l'artiste
C'est la dénomination qui me gêne et puis je ne suis pas dans la construction de l'image.
A la différence du peintre qui part d'une toile vierge moi j'ai besoin d'éléments qui sont déjà là. Je vais à la pêche en quelque sorte. Je suis de moins en moins sensible aux images construites en studio. J'aime beaucoup la rencontre avec les gens. Sinon, on pourrait me qualifier de fouineur. Je prends peu de clichés. En voyage, je me balade en rêvant et ce sont des détails qui retiennent mon attention, un verre brisé, une poubelle plutôt que des monuments.







Je vais trouver naturellement extraordinaire ce que la plupart trouve ordinaire. J'ai la même démarche lorsque je photographie un opéra. Ainsi, je travaille depuis deux ans pour Angers Nantes Opéra et je découvre tout, c'est un monde entièrement nouveau pour moi et je suis émerveillé comme un gamin. C'est peut être grâce à regard de gosse que je fais ce type de clichés. Il ne faut pas que je m'installe dans une sorte de confort.

Est-ce qu'on est voyeur quand on est photographe?
Je suis très mal à l'aise avec ça. J'ai toujours été timide à tel point que le fait d'entrer dans un café me coûte. J'ai mis du temps à pouvoir prendre en photo des gens dans la rue.


Petit déjà, tu avais cette attirance pour la photographie?
Mon père adorait le cinéma et il avait une caméra 8 mm mais il avait une maladie (rétinite pigmentaire) qui l'a fait devenir aveugle très rapidement. Est-ce que, inconsciemment, cela m'a dirigé vers ce métier, je n'en sais rien mais je prenais souvent sa caméra vers 7, 8 ans. J'ai fait preuve d'initiative et je suis devenu adulte très tôt. Il y avait le côté technique qui me plaisait. J'ai eu mon premier appareil vers 1965, c'est un oncle, alors élève ingénieur qui me l'avait ramené des États unis. C'était un tout petit appareil avec des rouleaux comme du 6x 6 et ce qui m'intriguait c'était la transformation du petit rouleau en papier qui allait devenir un négatif, puis une image, cela m'apparaissait magique . A Noël 1970, à 12 ans donc, mes parents m'ont offert un petit compact, un 24x36, un Zeiss Ikon.
Mais comme cela coûtait cher de faire développer ses photos, j'avais installé un labo chez mes parents dans un placard. J'ai tout installé seul, de l'électricité à la peinture, en passant par la pose de l'agrandisseur, etc. J'ai un peu joué à l'apprenti sorcier parce que, comme je n'y connaissais rien en bricolage, je ne faisais pas les bons branchements, résultat, il y a eu quelques menus incidents. Mais quel bonheur après de voir apparaître l'image.

Quel genre de photos faisais-tu à l'époque?
Des paysages, des photos de famille, j'en ai retrouvé une prise de la fenêtre de chez mes parents. On voit le facteur faire sa tournée.
Je ne supportais pas le collège, je dirais même que je le subissais et alors j'allais me réfugier dans mon placard, baignant dans sa lumière rouge.

A l'origine, la photo était donc un refuge alors que maintenant tu dis qu'elle te permet de t'ouvrir aux autres
Je ne prenais pas du tout les gens en photo, je n'avais pas la maturité que peuvent avoir les jeunes aujourd'hui.

Tu étais à ce point timide?
Oui, énormément, cela a été un handicap énorme. Je rends l'école un peu responsable de cet état. Mais aujourd'hui cette timidité me sert car les gens sentent que je ne vais pas les agresser, que je ne suis pas un voleur d'images. La timidité s'ajoute au respect que j'ai pour mes interlocuteurs.
Je n'aimais pas l'école, l'autorité qui régnait dans l'enseignement catholique de l'époque.
L'appareil photo m'a permis de trouver une place dans les groupes car tu te caches derrière lui et ensuite tu amènes un tirage, du coup, les gens te regardent autrement. J'aurais préféré jouer de la guitare. Je ne suis toujours pas très à l'aise dans les groupes.
Je n'ai pas choisi d'être photographe ce sont les rencontres qui m'ont construit, ça mêlé à ma curiosité.

Tu ne pourrais pas être reporter alors?
Non, je me mets à la place des gens qui sont photographiés. Ainsi je n'ai pas envie d'aller en Afrique ou dans les pays du Tiers-monde car je ne me sentirais pas à ma place avec mon appareil en bandoulière. Ou alors il faut y être pour une bonne raison pas en tant que touriste.
J'ai fait des portraits de Kosovars réfugiés à Angers, qui vivaient dans la caserne Desjardins, mais c'était différent car il y avait des intermédiaires et du temps et on me l'avait demandé.
La difficulté d'être photographe maintenant tient en partie au fait que tout le monde est photographe et que la plupart du temps tout le monde fait n'importe quoi avec son appareil photo. J'ai honte quelquefois d'arriver avec ma sacoche. Quand je me présente devant les gens que je dois photographier, je dois leur prouver que je ne suis pas dans cette pratique qui consiste à tout photographier, souvent sans respect pour l'autre. Parce qu'ils ne me connaissent pas et ne connaissent pas ni mon travail ni ma façon de travailler. Je suis en plein questionnement en ce moment. Il y a la nécessité vitale de faire de la photo, la nécessité économique également car c'est mon métier et en même temps je vois cette profusion d'images. Je suis un peu paumé.
Comment parviens-tu à retranscrire ces échanges par un instantané car la prise de vue est très brève?
La rencontre proprement dite prend 80% du temps, car d'abord il faut convaincre la personne, dont je veux faire le portrait, qu'elle est "photogénique", du moins jusqu'à ce que je sorte mon appareil. Du coup j'en arrive à des discussions intéressantes et finalement je me nourris de ces échanges.
Ce n'est pas facile effectivement car soit je vois des attitudes qui me conviennent en tant que photographe mais je ne suis pas disponible à ce moment-là car je suis dans l'échange verbal, soit ils se bloquent devant l'objectif.


Quel est ton statut?
C'est un peu comme la maison des artistes, cela concerne les auteurs. Je facture en droits d'auteur. Il y a plein de travaux que j'effectue qui ne sont pas facturés parce que ce sont des petites compagnies qui n'ont pas d'argent. On utilise aussi certains de mes clichés sans me demander l'autorisation ou en me créditant sans me rémunérer. Les personnes ne connaissent pas notre situation et ne se rendent pas compte que notre travail mérite salaire.

Est-ce que tu as envisagé un moment d'être photographe de presse?
Non, jamais. Cela ne m'intéresse pas.
Je fais parfois des reproductions de tableaux. Il n'y a pas beaucoup de photographes qui peuvent vivre sans travaux alimentaires.

Des influences?
Le premier photographe qui m'a vraiment influencé, c'est Jeanloup Sieff. C'était mon maître. Gamin, j'ai été impressionné par la série "Vallée de la mort", ces photos très contrastées. Il y en a une où l'on voit des montagnes au fond, un buisson, au premier plan et entre les deux, la terre craquelée. Quand on est enfant on aime les grands angles, les contrastes. On m'avait offert vers 17 ans "la photo" bouquin coréalisé avec un autre photographe Chenz. Je m'alimentais côté technique auprès de Chenz, et je prenais le côté poétique de Sieff.

Quelle est ta formation?
Je suis autodidacte, j'aime bien découvrir par moi-même, faire ma propre expérience. Je me mets dans les traces de celui qui a fait les premières découvertes. J'ai beaucoup appris dans les bouquins ou en allant voir des expositions. J'ai passé un bac scientifique, puis j'ai un peu galéré, je suis allé jusqu'au Cap Nord à vélo, réalisant un diaporama sur ce voyage. J'ai toujours fait des photos mais je ne les montrais pas. J'ai été vendeur au rayon photo dans une grande surface pendant un an. Puis la rencontre de Philippe Leduc de Lucie Lom m'a redonné confiance, car je suis quelqu'un qui doute énormément. Je dois tout aux Lucie Lom, ils m'ont fait confiance, surtout Philippe qui m'a encouragé, m'a "boosté".


J'avais 28 ans et il m'a fait travailler pour le projet d'affiches polonaises, j'ai réalisé un diaporama pour exposer le projet aux élus angevins.
J'aimais bien travailler sur ce projet car le diaporama m'intéressait à l'époque, enchaîner les prises de vue, trouver de nouveaux moyens. En fait, j'étais attiré par le cinéma et c'est le manque de moyens qui m'a dirigé vers la photographie. A 18 ans, c'était impossible d'avoir une caméra 16 mm, la pellicule était hors de prix.

Tu voulais être cinéaste?
Oui, cela m'aurait plu. Avec un copain, on avait envie de s'acheter une 16 mm et de partir. Le diaporama m'a permis de lier l'image, le son. J'aime la musique aussi. Au retour du voyage dans le Nord, j'ai acheté un magnéto révox, des enceintes, un système de fondu enchaîné, des projecteurs. On l'a présenté au festival de Royan, devant Gérard d'Aboville. Mais ce n'était pas genre "connaissances du monde, c'était une forme de road movie poétique. J'aimais le chevauchement des images qui faisait apparaître une troisième image.

Je me suis petit à petit rapproché de l'humain. Il y a eu avec les Lucie Lom ce travail autour des compagnons d'Emmaüs. Ce fut un moment intense avec comme point d'orgue le repas pris en commun avec les compagnons et l'abbé Pierre. Il m'a fallu beaucoup de temps, environ 5 ou 6 mois car la plupart étaient réticents voire hostiles, puis à force de me voir, avec mes deux enfants qui m'accompagnaient, ils ont changé d'attitude allant pour certains à me solliciter.
Je voulais une proximité et j'ai donc utilisé le grand angle mais pour cela il faut avoir une qualité, la rapidité quitte à être moins exigeant côté technique.

Comment procèdes-tu?
Je ne sais pas si c'est correct mais j'ai envie de dire que je vais vers la photo. Je vais chercher un endroit et puis j'attends, je ne suis pas sans cesse en train de bouger. En concert, je vais me mettre dans un coin et y rester, je suis sur le qui vive sans arrêt, je ne veux pas me mettre en scène , mais me faire oublier, il ne se passera peut être rien d'ailleurs...

Cela me fait penser à Doisneau, Ronis, Izis
Je n'ai pas été tout de suite sensible à leurs photographies mais en vieillissant je me sens de plus en plus proche d'eux.
Je ne cherche pas à faire de la photo à tout prix. En particulier, dans le spectacle de rue où je ne dois pas parasiter le spectacle, j’essaie de me fondre dans le public. Dans une salle de spectacle, c’est un peu différent. J’aime prendre mon temps, être présent très longtemps à l’avance, voir les échauffements, m’immerger dans le climat ambiant, j’ai envie de garder une certaine naïveté.

Tu utilises principalement le noir et blanc?
Pas spécialement. J'ai commencé par le noir et blanc parce que je développais moi-même pour raison d'économie, puis avec le diaporama je n'utilisais que la couleur. Ensuite, pour les spectacles, je préférais le noir et blanc car tu pouvais pousser les sensibilités. Avant, j'aimais beaucoup travailler les paysages alors la couleur s'imposait d'elle-même surtout à cause de la lumière, comme le travail réalisé autour de la Loire mais cela dépend du sujet. Je reviens des Pyrénées où le paysage était tellement aride, avec des arbres tordus, un peu de brume que le noir et blanc pouvait le disputer à la couleur. C'est une histoire de lumière, certaines lumières me fascinent, elles rendent le paysage irréel, à tel point que certains spectateurs pensent que j'utilise des filtres, or je n'en utilise jamais.

Le numérique a changé ta manière de photographier?
Non, pas du tout, cela m'enlève le petit stress que j'ai eu très longtemps quand j'attendais le retour du labo. Je voulais voir s'il y avait quelque chose sur la pellicule. Ce stress était dû à mes premières expériences quand j'ai commencé à faire mes premiers développements en 1970. Auparavant je déposais mes pellicules à développer chez Guiraud à Angers, puis je me suis lancé dans le développement, à 12, 13 ans avec juste un bouquin pour me guider car je ne connaissais rien à la photo. Je m'autofinançais en vendant des clichés sous forme de cartes postales que mon père acceptait d'accrocher dans sa librairie papeterie. Je me revois dans mon placard, avec ma lampe rouge, ma pellicule dans la boîte, puis arrive le moment où je sors le film, rien, c'était tout noir, or j'avais fait des photos de ma petite sœur qui venait de naître. Je me rappelle que tout le monde m'était tombé dessus parce j'avais tout raté. Je fais un deuxième essai, pareil, tout noir, alors je raconte mes malheurs chez Guiraud, qui se marre parce que le développement doit se faire dans le noir total, ce que je ne savais pas à l'époque.


Après je me suis mis dans le noir pour faire mes développements. On peut faire faire le rapprochement avec la cécité de mon père bien sûr car là, tu ne travailles qu'au toucher, et on se rend compte alors de l'importance de ce sens qu'on oublie, surtout quand tu fais de la photo. D'ailleurs, on peut remarquer que si la photographie est un art visuel, il y avait une étape dans la fabrication de l'image où le sens, la vue, était complètement absent. Il ne faut pas oublier non plus la camera obscura, la chambre noire. Ce serait du pain béni pour mon analyste si je m'allongeais sur son divan quand on connaît mon histoire familiale.

Qu'est-ce qu'une photo réussie?
Doisneau disait que s'il avait fait une centaine de photos de bien dans sa vie cela ne représentait au 1/125e qu'une seconde de vie. Après une prise de vue, je ne suis jamais satisfait. J’ai souvent l’impression d’avoir manqué la photo que j’aurais aimé faire. Heureusement, avec un peu de recul, on redécouvre les images et on se dit que finalement ce n’était pas si mal. Même si l’expérience compte, sincèrement,
j’ai l’impression de ne rien savoir. À chaque spectacle, je suis toujours aussi anxieux.
Je me souviens d'une photo prise dans la rue, un homme, SDF, m'avait interpellé car me voyant avec mon appareil photo il croyait que je voulais prendre un cliché de lui contre son gré. S'engage alors une discussion où il me raconte sa vie. Forain, il travaillait sur la grande roue puis après une mauvaise chute, il s'était retrouvé sans rien car il n'était pas assuré. Puis la rue. Alors qu'au début, il criait sans cesse "j'veux pas de photos", à la fin de notre discussion, il m'a demandé de lui faire un portrait, il voulait poser ce que je ne voulais pas. J'ai pris deux ou trois clichés et c'est une fois arrivé à la maison que j'ai vu l'affiche contre laquelle il était appuyé.

Le site de Jean-François Rabillon:
http://www.rabillon.com/index.htm

vendredi 4 décembre 2009

Portrait de Claire Alary, artiste peintre

Claire Alary est née à Paris en 1958. Après de multiples déménagements dûs à la profession du père, receveur des Postes, elle s'installe à Angers pour suivre les cours de l'école des Beaux arts dont elle sort diplômée en 1984. Également titulaire d'une maîtrise d'arts plastiques et d'un DEA Arts plastiques de l'université Rennes II, elle donne des cours notamment à l'école des Beaux arts d'Angers. Actuellement elle vit et travaille à Savennières, petit village niché au bord de la Loire, comme peintre et plasticienne. Elle expose régulièrement ses travaux en France, en Allemagne et aux Pays Bas. L'une de ses dernières expositions a eu lieu au grand Théâtre d'Angers dans le cadre des Accroche cœurs.
Enfant elle hésitait entre être Picasso ou danseuse étoile, puis la nécessité de peindre s'est faite impérieuse, d'abord comme béquille psychologique puis comme une évidence, naturellement "sans faire de choix", peut être parce qu'elle ne voyait pas ce qu'elle pouvait faire d'autre.
Sa peinture parle de ses voyages réels ou imaginaires. Elle travaille des médiums aussi divers que le collage, le vitrail, la peinture, la gravure, l’image numérique, le bogolan et tout récemment la terre.

Vitrail du soir au matin

Tout peut prendre sens dans son travail dans la mesure ou cela sert son besoin de créer des formes, non pas nouvelles mais au contraire reconnues et reconnaissables, une femme, un arbre, des organes, un crapaud... un monde en perpétuel renouvellement, des formes archaïques qui jaillissent de la matière gravée, striée, malmenée.


Je vous livre ici l'entretien réalisé dans son atelier au début du mois de décembre 2009.



Pourquoi peintre et pas sculpt
eur ou photographe ou cinéaste? :
Quand je suis entrée aux Beaux Arts, je me destinais à une carrière d'illustratrice de livres pour enfants. Puis je me suis rendue compte que ce n'était pas ma voie, parce que cela m'est apparu réducteur. Je voulais m'interroger sur ce qu'est la peinture, l'acte de peindre.

masque bogolan 1

Ce qui m'intéresse c'est ce que j'appelle "la cuisine", le "faire", travailler avec la matière, les composants. On peut tout maîtriser avec la peinture sans avoir besoin de personne avec une remise en question quasi-permanente même si on peut être tenté de se reposer sur certains acquis. Je suis en recherche permanente, en questionnement sur la peinture en tant que telle. J'aime aussi le côté travailleur solitaire qui mène son travail de A à Z.

Qu'est-ce qui te motive? :
Se trouver soi-même. Henry Miller disait que certains se trouvaient rapidement alors que d'autres avaient besoin de chemins plus longs, sinueux, tortueux. Je n'ai pas l'impression que je peux aller au cœur tout de suite. Peut être que je m'arrêterais de peindre quand je me serais trouvée, ce qui n'est pas près d'arriver à mon sens. (éclats de rire)

Sabbat à Lascaux

Avec le temps, je me suis rendu compte qu’en réalité et depuis toujours, j’étais mon propre sujet.
Mon expérience, ma vie, nourrissent ma peinture. Ce n’est pas par exagération ou pour faire une figure de style que je dis cela, c’est tout simplement parce que je ne peux pas penser à ma peinture sans évoquer ma vie. Les choses se sont mêlées au point que des choix de vie ont déterminé des choix de peintre et qu’inversement des choix de peintre ont plus
ou moins influencé ma vie quotidienne. Je n’irai pas jusqu’à dire comme l’on fait des artistes avant moi que l’art c’est la vie, mais j’aimerais bien que cela soit le plus vrai possible…
Je ne cherche pas à apporter des idées neuves ou inédites et mes peintures ne sont pas particulièrement novatrices. Elle sont à mon image, c’est à dire différentes de ce que vous feriez tout simplement parce que mon cerveau imprime les choses différemment, et que j’ai une histoire différente.

Voyages (gravure)

J’aime bien comparer mon cerveau au lit d’une rivière parce que mon vécu se superpose comme des sédiments et que ma main cherche à l’intérieur comme le pêcheur qui espère avec patience sortir un poisson de l’eau. Le pêcheur manque souvent sa prise mais il ne se décourage pas
pour autant. Le geste est aussi important que la prise…

Quel est le point de départ d'un tableau s'il y en a un? :
Cela peut être des obsessions, quelques mots qui reviennent avec insistance.
D'autres fois il n'y a rien, pas d'idée, pas d'image, sans envie. C'est presque préférable. Je peux comparer cela à la graine plantée dans l'humus qui va croître, on se contente de l'arroser, la diriger. C'est à partir de cet embryon que je travaille.
Peindre c'est ordonner un chaos. Je ne suis pas le médium qui retranscrit sur un écran une image qui préexisterait dans ma tête ou ailleurs. J'avais ce sentiment étant plus jeune, ma main était guidée, mais ce n'est plus ma posture. On est à l'intérieur d'un chaos et on a besoin d'ordre car on est submergé par ce qui nous entoure. Plus jeune, cela s'apparentait à un combat, j'ignorais ce qui me forçait à combattre et contre qui je me battais. Quand je dis mettre de l'ordre c'est éliminer et choisir ce que je veux garder et mettre dans mes toiles.


Il m'arrive d'utiliser des photographies comme amorce de mon travail, comme pour la série des paysages. Pour l'une d'entre elles, je me suis inspirée de deux photographies en noir et blanc prises au Mali en pays Dogon. J'étais en haut d'une falaise où je dominais tout le paysage et où j'étais aspirée par la beauté et la grandeur de celui-ci. Sur la photo tu as l'impression d'être au-dessus comme si tu étais dans une montgolfière mais aussi presque dedans, puisque tu distingues les maisons, les détails. Ce jeu avec la perspective m'a intéressé. J'ai bien sûr modifié ce que l'on voit sur les photos, les dessins préparatoires étaient plus proches d'elles que ce que l'on voit sur la toile. Les deux perspectives figurent comme point de départ mais à la fin il ne reste plus grand chose des paysages originels. Il y a plusieurs points de vue comme si on voyageait et dans le paysage et dans la toile.


Ce que je voulais également c'était travailler avec la matière, ici le latex et la cendre. La cendre, très fine est volatile et peut se mélanger facilement avec des tons chauds mais aussi avec les froids. Au centre de la toile il y a ce que j'appelle la pierre, qui a son histoire propre puisque cette forme renvoie à une pierre qui m'a été donnée par un artiste rencontrée par hasard en Bretagne et qui en se fendant a révélé une structure de type ferreux en son sein. C'est un peu comme de la magie , comme s'il m'avait révélé quelque chose mais après coup. Je le vois comme une transmission. Dans la toile elle a un peu plus l'apparence d'un mégalithe, d'un totem mais aussi elle ressemble à une présence féminine. On pourrait y voir une femme qui descend la colline mais qui serait mariée à l'image du feu, du volcan, de la lave que m'évoquait au départ la pierre quand je l'ai reçue. Ce n'est pas le résultat d'une réflexion, je ne pensais pas particulièrement à cette forme au moment où j'ai commencé à peindre cette toile puis l'idée de la pierre est arrivée et s'est imposée. A l'origine, je ne pensais qu'à la lave, à cette idée d'île, d'obstacle qui nous empêche d'aller de l'autre côté.

Est-ce que tu travailles vite?
Ici, le travail a été rapide car j'ai peint ce tableau en trois heures environ. De toute façon, je travaille plutôt vite même si je retravaille certaines parties. Je ne suis pas capable d'analyser la genèse de cette forme que j'ai travaillée pour qu'elle ne figure pas un trou mais un plein intrigant, avec sa part de mystère.
Dans presque toutes mes toiles en ce moment je m'aperçois qu'il y a une forme qui s'impose alors qu'elle ne devrait pas être là. Cela peut être du zinc, où là des pieds.
Je m'arrête quand je sens que le tableau est fini mais je me trompe parfois. C'est seulement quelques années plus tard que l'on sait si on avait raison. Je ne peux pas revoir certaines toiles. Elles ne me satisfont plus alors que d'autres vont garder une certaine valeur à mes yeux. Encore qu'il soit difficile d'être pleinement satisfaite par ce que je peux produire. Mais certaines ont tellement de manques qu'avec le temps, les imperfections me sautent aux yeux.

Totem

Il m'est arrivé de ne pas reconnaître un tableau qui était accroché chez quelqu'un. C'est rare que je sois complètement détachée d'une œuvre. Ainsi quand je me suis retrouvée chez un collectionneur qui me montrait les dommages subis par un tableau j'ai éprouvé une véritable souffrance presque physique alors que j'avais oublié cette toile. D'une manière générale je suis gênée de me retrouvée face à un de mes tableaux lorsque je dîne chez des amis. J'ai envie de le regarder sans arrêt, de tout changer.

Comment caractérises-tu ta peinture? :
Pour moi, ma peinture est figurative. Mais quand on me posait cette question il y a une dizaine d'années je répondais abstraite et pourtant c'était tout le contraire. Maintenant je réponds figurative. C'est de la figuration.
J'ai eu, comme beaucoup, des maîtres ou du moins j'ai été influencée par des peintres, notamment par Kandinsky, Alechinsky, Dubuffet, mais l'influence n'est pas forcément directe. Par ailleurs, je donne également des cours et à ce titre je visite l'œuvre de peintres qui, au départ, ne m'attirent pas particulièrement comme Soulages par exemple. Plus je parcours son œuvre plus il m'intéresse et cela ne me laisse pas indifférente. Il y a, a contrario, des peintres que j'aime comme Matisse mais je ne suis pas certaine qu'il ait eu une influence sur ma production. Certains tableaux m'ont impressionnée comme" L'enlèvement des Sabines" mais je ne saurais pas analyser ce que cela provoque en moi.
Il y a ceux qui m'ont accompagnée longtemps comme "L'île des morts" d'Arnold Böcklin. Ce tableau me fascine et m'intrigue. Il y règne quelque chose d'étrange, d'intemporel, de magique; le temps, l'espace n'existent plus car l'île est au loin et on a l'impression d'y être presque. L'espace est à la fois clos et ouvert, cela me fascine. Pourquoi avoir envie d'aller sur cette île car il n'y a rien puisqu'il y a que des morts et pourtant, elle nous attire. Le tableau garde tout son mystère. Ce paysage m'est revenu à l'esprit en peignant dernièrement.
Longtemps j'ai eu peur que le monde environnant ne vienne me perturber dans ma façon de peindre, je me protégeais mais ce n'est plus le cas maintenant. Je peux regarder les choses, affronter ce qui se produit dans le monde même si c'est très violent.

Est-ce que l'on retrouve ce monde dans ta peinture? :
Dans certaines toiles, l'extérieur est venu s'immiscer mais l'actualité non. Je ne sais pas faire une peinture militante et cela ne m'intéresse pas. Je ne suis pas ancrée dans le social ni dans le politique. Je m'intéresse plus aux individus qu'aux mouvements sociaux. L'intériorité, l'aspect mystique m'attirent davantage que le côté temporel. Le débat sur la place de la peinture aujourd'hui, son utilité, sa mort annoncée ne me passionne pas non plus.

Je m'ouvre aux autres médiums comme la sculpture, le land art mais je suis toujours attirée par une réflexion sur l'homme. Je peux transposer ma problématique à travers un autre outil mais je ne veux pas parler de la nature en tant que telle si on prend l'exemple du land art. Ainsi j'ai un projet appelé "Les arbres zingués" où les arbres se retrouveront affublés de corsets en fer. Il y a un sens, ils auront une double peau les protégeant et les emprisonnant à la fois, ce n'est pas qu'esthétique. Je ne me reconnais pas non plus dans la peinture de Morellet, ou de Vasarelly qui est à mon sens loin de l'homme et plus proche des mathématiques.
Je ne me sens pas proche non plus de certains artistes femmes qui adoptent une posture féministe, alors que je suis d'accord avec les revendications mais la question de la place de la femme dans notre société ou dans l'art m'est étrangère. Ce n'est pas cette mise en danger qui me motive. Je trouve les travaux de Louise Bourgeois intéressants car il y a une problématique disons féministe mais pas uniquement, il y a de l'universel dans son art. La féminité ou la condition féminine sont transcendée comme le faisait Niki de Saint Phalle au début. Ce qui me gêne c'est l'étalement pur et simple même si je comprends tout à fait que l'on puisse utiliser ce moyen de s'exprimer mais il ne me correspond pas en tant qu'artiste.


Est-ce que le lieu où tu peins a une importance?
Le fait d'avoir un nouvel atelier a modifié ma manière de peindre puisque je peux utiliser des formats beaucoup plus grands qu'avant, plus haut , plus larges aussi. Je suis libérée de certaines contraintes. J'ai pu ainsi utiliser un châssis qui était hors service à cause de ses dimensions.
Cela concorde au début des travaux sur le paysage.






Tes toiles ont-elles toujours un titre?
Oui, toujours. Le titre apparaît à la fin, parfois longtemps après. Il sert à plusieurs choses,
la nommer pour pouvoir s'en souvenir, l'identifier,et à préciser ton idée. Rarement pendant l'exécution sauf pour la toile que j'ai nommée "Au dessous du volcan" en référence au roman de l'écrivain britannique Malcolm Lowry. J'y ai pensé pendant que je travaillais, dans le livre on a le sentiment que quelque chose va arriver, que quelque chose va éclater, il y a un bouillonnement perceptible que je voulais retrouver sur la toile, quelque chose qui se cristallisait.
Je peins sur d'anciennes toiles que j'ai gardées et qui ne me satisfont plus. Là dessous, il y a une femme monstre comme on peut en retrouver dans certaines peintures aborigènes, personnage radiographié avec des membres qui se dirigent dans plusieurs directions. Avant encore, il y avait un cerveau.



Restent-il des traces? :
Oui, ces vibrations de couleur, ces sommets qui émergent des toiles précédentes. C'est ce contenu sous-jacent qui intrigue et attire le regard. Les pieds proviennent d'une autre toile intitulée "Les pieds bleus" mais ces derniers étaient en bas et c'est en retournant la toile que cette vision des pieds en haut de la toile s'est imposée. En fait, là on peut dire qu'une toile en a amenée une autre.

Pour les dernières toiles j'ai envie de dire qu'elles sont venues à moi car au départ ce n'est pas ce que je voulais faire. Il devait y avoir des formes organiques d'où sortaient des formes vitales. On y voit un noyau avec un jaillissement qui m'a échappé lors de la réalisation. Puis quand je l'ai retravaillé la vision de L'île des morts de Böcklin s'est interposée et cela explique cette perspective écrasée.

Expositions récentes :
Grand Théâtre d' Angers
Musée de Norden (Allemagne)
Résidence "la source"
Galerie Peinture fraîche Paris
Biennale de Douala (Cameroun)
Galerie WBZ, Norden (Allemagne)
Commande de Sea France pour le ferry Berlioz

mercredi 25 novembre 2009

Qu'avait derrière la tête AIDES en affichant une petite culotte?


Pour ceux qui ne sont pas abonnés à "Arrêt sur images", voici un condensé du dernier article de la chronique d'Alain Korkos intitulé : La petite culotte d'Iwo Jima.
L'affiche annonçant la Grande Braderie de la Mode au profit de l'association Aides, qui aura lieu les samedi 5 et dimanche 6 décembre 2009 à Paris reprend la célèbre photo d'Iwo Jima, et on se demande un peu pourquoi. Oui, la lutte contre le sida est un vrai combat, d'accord. Mais utiliser des symboles amerlocains n'ayant que peu d'écho par-cheu-nous n'est peut-être pas le moyen le plus approprié de dire les choses.

S'ensuit un petit rappel historique.
La bataille d'Iwo Jima opposa les Etats- Unis et le Japon lors de la Seconde Guerre mondiale. Le 23 février 1945, les Américains conquièrent l'île et y plantent un drapeau.

Deux photos sont prises par Lou Lowery, elles montrent le 2ème bataillon du 28ème de Marines plantant ledit étendard au sommet du mont Suribachi à 10h20 du matin, le 23 février 1945 .

Le film Flags of our Fathers de Clint Eastwood raconte la vision amerlocaine de la bataille d'Iwo Jima, et notamment l'histoire - un tantinet édulcorée - de cette photo .
Le film de Clint Eastwood est sortie en France sous le titre Mémoires de nos pères. Sur l'affiche française, toute référence au drapeau d'Iwo Jima a disparu. Derrière chaque soldat se cache un héros, dit le slogan.


Sur l'affiche pour la braderie en faveur de la lutte contre le sida, l'étendard a été remplacé par une petite culotte sur laquelle est fiché le célèbre ruban rouge.

On peut se demander effectivement si l'association Aides n'aurait pas été plus inspirée en reprenant l'affiche française et son slogan. On peut penser que derrière chaque personne qui lutte contre le soldat se cache un héros. Encore une fois, les experts en communication se sont trompés et ont privilégié le côté racoleur, humoristico-esthético-poupoum. L'affiche est belle, certes mais assez vide de sens à mon avis.

jeudi 19 novembre 2009

Qu'avait derrière la tête la rédaction du quotidien sportif "L'Equipe" en titrant la main de Dieu?


La Main de Dieu" ?
Plutôt que "la main de Dieu" ("Hand of God") de Diego Maradona contre l'Angleterre au Mondial-1986, Le quotidien sportif" L'Equipe" aurait du titrer "La main de Titi". Car que vient faire Dieu ici. Maradona s'était auto proclamé ainsi ou ,selon, avait indiqué que c'était le Ciel qui avait guidé son geste. On imagine volontiers que le même dieu a été convoqué à Khartoum, qu'il a finalement choisi l'Algérie et que sa main pour quelques centimètres a permis au ballon de pénétrer dans la cage égyptienne. Mais au Stade de France? Un autre dieu a-t-il de sa main aveuglé le trio arbitral suédois, seul à ne pas avoir vu la faute de l'attaquant français?
En effet, de quel Dieu s'agit-il? Dieu du stade? Alors, Thierry Henry serait ce dieu mais on peut imaginer une autre attitude de sa part plus conforme à l'éthique et au fair-play comme le souligne les Irlandais. L'ancien attaquant irlandais Tony Cascarino a qualifié jeudi Thierry Henry de "tricheur hypocrite" .
"Thierry Henry est un tricheur hypocrite qui a terni sa réputation pour de bon", écrit l'Irlandais dans le quotidien britannique The Times où il tient une chronique régulière. "Je suis dégoûté pour l'Irlande et le football."
Cascarino se demande si Henry aurait dû aller se dénoncer auprès de l'arbitre: "C'est une question de conscience (...) Cela n'aurait jamais été une question pour moi, car je n'étais pas un tricheur."

"A mes yeux, cette main était une tricherie évidente, calculée. Involontaire? Il a débord touché le ballon pour le garder en jeu puis l'a de nouveau touché pour qu'elle arrive joliment sur son pied droit",
accuse Cascarino.

Selon l'Irlandais, Henry "aurait gagné l'admiration du monde entier" s'il avait reconnu sa faute auprès de l'arbitre. "Il aurait pu être un phare d'intégrité. A la place, il a jeté la honte, sur lui-même et sur le football."

Selon Cascarino, "l'Irlande était bien meilleure que la France" et "les joueurs de Raymond Domenech ont des coeurs de la taille de petits pois."

Interrogé sur le sujet, Giovanni Trapattoni considère que l'homme en noir aurait dû consulter le principal intéressé sur ce fait de jeu: «Si l'arbitre avait posé la question à Henry, il aurait dit ''oui, c'était une main sur le ballon''», pense le sélectionneur italien de l'Irlande. «On a vu l'arbitre hésiter, regarder Henry, il aurait dû lui demander son avis, a poursuivi le Trap'. Je regrette amèrement tout ça. Ce n'est pas la faute d'Henry, c'est une question de fair-play. Ce n'est pas facile à accepter. Sur cette action-là, on change les règles. On parle en permanence du fair-play, fair-play, fair-play. J'en ai parlé aux jeunes footballeurs tant de fois dans ma carrière, pour leur dire que c'est important dans la vie. Mais c'est dur.»

Mais voilà, fair-play ne se traduit pas en français, voici la réponse du Titi, surnom de Thierry Henry :

"Oui, y a main, mais je suis pas l'arbitre, a déclaré le capitaine des Bleus. "Toto" (Squillaci) va à la lutte de la tête, je suis derrière deux Irlandais, la balle redondit et elle tape ma main".

"Bien sûr, je continue à jouer, a-t-il poursuivi. L'arbitre ne siffle pas main, mais je ne peux pas dire qu'il n'y a pas main".

A la question de savoir si ce fait de jeu altérait sa joie, il a répondu: "Non, non. On est qualifiés".

On voit ici le gavroche, le poulbot, gamin parisien facétieux ou malin face au gros minet irlandais plutôt que le dieu du stade élégant et sûr de son fait qui va voir l'arbitre pour lui signifier son erreur. Donc le titre de "L'Equipe" est nul. Je préfère de loin celui du journal Libération :
"Les Bleus, oh la main"
ou encore
"La main de la délivrance pour les Bleus", "Henry donne un sacré coup de main aux Bleus" car la presse nationale française ironise jeudi sur la faute non sanctionnée de Thierry Henry . Autre référence à la religion :
"Miraculeux", titre également le Parisien/Aujourd'hui en France" car effectivement cette qualification tient du miracle. Quelques titres encore plus pertinents à mon avis que celui de "L'Equipe"

"Qualification des Bleus au Mondial. Des pieds et d'une main", toujours chez Libé ou encore
"La France a la main verte" proposé par David Abiker.

De son côté, la presse irlandaise montrait du doigt "le tricheur" Thierry Henry, après sa main qui a amené le but qualifiant la France pour le Mondial-2010 aux dépens d'une République d'Irlande "volée".

Les tabloïds de l'île se déchaînaient: "Nous avons été volés", constate l'Irish Star, "Le Cheat" ( le tricheur), accuse l'Irish Mirror à côté d'une photographie de l'attaquant du FC Barcelone.

l'Irish Sun préfère voir dans le geste du Français une moins glorieuse "hand of frog", usant du surnom peu amène réservé aux Français sur les îles britanniques.

La presse traditionnelle n'est pas plus tendre: "Braquage à main armée", lâche en titre l'Irish Independent, "cambriolage à la lumière du jour", renchérit l'Irish Examiner qui appelle à la mise en place de l'arbitrage vidéo.

L'Independent regrette une "immense injustice pour les hommes en vert qui voient une bourde de l'arbitre envoyer la France en Afrique du Sud".

"Les Irlandais inconsolables alors que la main d'Henry est la seule chose qui sépare les deux équipes", constate, plus sobre, l'Irish Times.




samedi 14 novembre 2009

Qu'avait donc derrière la tête Martine quand elle affirmait qu'elle aimait la bite?

Hélas, trois fois hélas, le cybercanular à la mode dû au site Martine cover generator qui proposait de composer soi-même sa couverture d’album trash (Martine mange du caca, Martine congèle son enfant), a vécu car le site a fermé ses portes le 18 Novembre 2007.
Je vous propose ci-dessous l'analyse de David Abiker, journaliste à France info, spécialiste du Net grâce à qui j'ai découvert ce site. A méditer, analyser car on est pas obligé de le croire ou d'être d'accord.
"Le succès de ce Martine-là sur la toile correspond, je crois, à un besoin de transgression qui ne s’exprime plus en surface. Je le perçois comme une volonté de se réapproprier non pas les territoires de l’enfance façon adulescent (contraction de adulte et adolescent) mais au contraire d’envoyer à l’époque de l’enfant est roi une sorte de rappel à l’ordre. Martine qui aime la bite c'est la blague d'un adulte qui saute à pieds joints dans une flaque d'eau pour provoquer un rire sain et suggérer que les temps qui courent sentent un peu trop la fraise Tagada. Affirmer à la face du monde que Martine aime la bite, c'est aussi se demander si nous n'accordons pas trop d’importance aux bébés congelés, aux chiens qui mangent les mômes et bien sûr aux stars planétaires du tripotage façon Vico.

Non pas que ces faits (divers parfois) n’aient aucune importance, mais chacun se doute qu’ils ont souvent dans la hiérarchie de l’information une place démesurée ; une place démesurée dans un occident ivre de jeunesse, d’immortalité et de maternage. Rire de Martine qui aime la bite, ce n’est pas être un monstre ou un mangeur d’enfant, c’est au contraire occuper notre place d’adulte au côté de nos enfants."

Car en bon père de famille, il censurera cette page et évitera de répondre à sa fille qui lui demandait s'il croyait que Martine aimait la bite. Je trouve pour ma part cette partie de l'histoire aussi drôle que le plagiat des couvertures de Martine. D'autant plus qu'il est journaliste à France info, qui participe à cette hiérarchisation de l'information. Pour preuve, aujourd'hui essayez d'échapper à Irlande-France en écoutant les chaînes généralistes de la radio.
Pour vous consoler vous pouvez toujours parodier des affiches de cinéma sur
http://hollywood.logeek.com/


jeudi 5 novembre 2009

Qu'a donc derrière la tête Eric Besson en lançant son grand débat sur l'identité nationale?



Certains n'ont pu s'empêcher de remarquer que la dernière initiative d'Eric Besson -le « grand débat » sur l'identité nationale- avait des fins électoralistes arguant que la date prévue pour la conclusion de cette série de causeries -fin janvier- tombait pile-poil avant le démarrage de la campagne UMP pour les régionales. D'autres jugent que c'est le moment d'aborder cette question jamais débattue en France.
Je vous propose deux articles pour avoir un avis plus éclairé.



Le premier, rédigé par l'historien Daniel Teysseire, provient de Rue89 et s'intitule :

Identité nationale figée ou Nation ouverte et généreuse ?

Sur cette question, ne convient-il pas de commencer par le commencement, c'est-à-dire par une généalogie ; bref : par l'histoire. D'aussi loin que l'on remonte dans l'existence de la France, au regnum francorum (le royaume des francs), on a un pays composite. Composite ethniquement ; composite linguistiquement ; composite culturellement.

Lire la suite sur:
http://www.rue89.com/2009/10/31/a-lidentite-nationale-figee-preferons-la-nation-ouverte-et-genereuse-124087

Le second est écrit par le journaliste suisse Sylvain Besson, correspondant en France pour le journal "Le Temps" et a pour titre :
Identité nationale: les leçons de la comparaison Suisse-France.


On ne peut que sourire devant la nouvelle offensive décrétée par le gouvernement français sur "l'identité nationale". Croit-il vraiment qu'une série de colloque dans les préfectures convertira les gamins de banlieue aux "valeurs républicaines"? En quatre ans de correspondance, je n'ai pas rencontré un seul Français capable de m'expliquer en quoi elles distinguaient leur pays de n'importe quelle autre démocratie.

Cela dit, quelques indicateurs informels suggèrent qu'il y a bien un trouble identitaire en France. Le plus sûr selon moi est le nombre de drapeaux dans les jardinets. En Suisse et aux Etats-Unis, c'est énorme: pas une zone villa où ne pullulent les étendards patriotiques (en Suisse, on peut encore raffiner en plantant le drapeau de son canton, pour montrer qu'on est un vieux-patriote, comme il y a des vieux-croyants dans l'église orthodoxe russe).

En France, en revanche, qu'on me détrompe, mais je vois beaucoup moins de signes spontanés de fierté nationale. A la place, une avalanche de commémorations étatiques, avec la Marseillaise chantée devant le monument aux morts le 11 novembre et le 8 mai. C'est historique, officiel, scolaire. En Suisse, je ne me souviens pas de la moindre heure consacrée à "l'identité nationale" ou quoi que ce soit d'approchant (l'instruction civique est plutôt une sorte de cours de droit constitutionnel à l'usage des enfants). Et pourtant Dieu sait si les Helvètes sont, à leur manière, chauvins.

Lire la suite sur : http://letemps.blogs.com/paris/